Par Bogdan Herzog â Le 16 janvier 2017 â Source Katehon
Voici les principales thĂ©ories expliquant la raison dâĂȘtre de lâinvasion en Syrie, parrainĂ©e par lâĂ©tranger, et qualifiĂ©e de guerre civile :
- Le démantÚlement du Croissant chiite comme décrit par Stephen Hersh dans son excellent article de 2007, The Redirection.
- La dissolution selon des lignes sectaires de tous les Ătats du Moyen-Orient opposĂ©s Ă lâAlliance occidentale â suivant les plans Ă©tablis par Oded Yinon, dans la StratĂ©gie pour IsraĂ«l, dans les annĂ©es 1980.
- Les facteurs Ă©conomiques mentionnĂ©s maintes et maintes fois â couloirs pipelines, etc.
Quelles que soient les raisons des Ă©vĂ©nements initiaux, il semble que le plan ait Ă©tĂ© au moins temporairement bloquĂ© par une combinaison de facteurs : la dĂ©termination de lâarmĂ©e syrienne, lâintervention de ses alliĂ©s musulmans â principalement le Hezbollah et lâIran â et celle, dĂ©cisive, de lâarmĂ©e russe.
Quelle que soit sa rĂ©ussite, la prĂ©sence significative des forces armĂ©es russes sur le champ de bataille dans un pays musulman comporte un scĂ©nario trĂšs risquĂ© â une rĂ©pĂ©tition de lâAfghanistan. Les avantages obtenus par le blocage de lâassaut occidental contre la Syrie doivent ĂȘtre pesĂ©s, face au risque dâagitation des sentiments anti-russes dans le monde sunnite et au risque politique interne associĂ© aux pertes du personnel militaire russe.
CrĂ©er une crise interne en Russie, le cĆur de la rĂ©sistance mondiale au monde unipolaire, fondĂ©e soit sur des pertes humaines importantes en Syrie, soit sur une augmentation des tensions avec les minoritĂ©s ethniques dans le pays, serait un gain beaucoup plus Ă©levĂ© pour lâAlliance occidentale que le dĂ©mantĂšlement dâun joueur rĂ©gional [en Syrie].
Graham Fueller, ancien vice-prĂ©sident du Conseil national du renseignement et architecte de la guerre en Afghanistan, en tandem avec Zbignew Brzezinski, a clairement dĂ©crit la stratĂ©gie : âLa politique consistant Ă Â guider lâĂ©volution de lâislam et Ă Â lâaider contre nos adversaires a merveilleusement bien fonctionnĂ© en Afghanistan contre les Russes. Les mĂȘmes doctrines peuvent encore ĂȘtre utilisĂ©es pour dĂ©stabiliser ce qui reste du pouvoir russe, et surtout pour contrer lâinfluence chinoise en Asie centrale.â
Bien sĂ»r, il nây a rien de nouveau dans les paragraphes ci-dessus. Toutes les donnĂ©es Ă©taient connues et prises en compte par les autoritĂ©s russes, longtemps avant de dĂ©cider dâenvoyer les premiers avions en Syrie. Alors, quels sont les objectifs stratĂ©giques, pourquoi la peine de risquer une crise majeure, peut-ĂȘtre la dĂ©sintĂ©gration du cĆur lui-mĂȘme ? Les objectifs Ă©noncĂ©s au dĂ©but de lâarticle valent-ils le risque dâune telle crise, ou y-a-t-il quelque chose dâencore plus important en jeu ?
Lâexpansion continue de lâOTAN vers lâEst, et en particulier les nouvelles installations de dĂ©fense antimissile en Pologne et en Roumanie, a placĂ© Moscou, «le cĆur» du cĆur, Ă quelques minutes dâune Ă©ventuelle attaque nuclĂ©aire et Ă peine Ă quelques centaines de kilomĂštres de puissantes unitĂ©s de chars. Compte tenu de lâisolement gĂ©ographique des Ătats-Unis, le «cĆur» de lâĂźle-monde, Moscou, ne peut pas riposter de la mĂȘme façon. On ne peut imaginer des chars russes ou chinois Ă 600 kilomĂštres de New York ou de Washington. En outre, on ne peut pas envisager des installations radar russes doublĂ©es par des systĂšmes anti-missiles dans le voisinage immĂ©diat des Ătats-Unis, Ă moins que lâon ne soit prĂȘt pour une rĂ©pĂ©tition de la crise des missiles cubains. Et personne ne veut ĂȘtre Ă nouveau Ă quelques minutes dâune guerre nuclĂ©aire, comme nous lâĂ©tions en 1962âŠ
Alors, comment Moscou peut-elle maintenir lâĂ©quilibre et rĂ©pondre aux menaces accrues Ă ses frontiĂšres ?
Eh bien, sâil faut en croire le chercheur Peter Hounam de la BBC, il sâavĂšre que le monde nâĂ©tait pas au bord de la guerre nuclĂ©aire seulement pendant la crise des missiles cubains. Câest arrivĂ© au moins Ă une autre occasion, le 8 juin 1967, pendant la guerre des Six jours. Ce jour-lĂ , un navire US, lâUSS Liberty, a Ă©tĂ© frappĂ© par des avions de combat et des torpilleurs. Beaucoup de gens sont morts dans ce qui Ă©tait initialement perçu comme un acte de guerre de la part de lâĂgypte. Des avions transportant des bombes nuclĂ©aires ont dĂ©collĂ© des porte-avions USS America et USS Saratoga de la VIe flotte. Selon les tĂ©moignages, les bombardiers Ă©taient Ă seulement trois minutes dâannihiler Le Caire, avant de faire demi tour. Pourquoi ?
Bien sĂ»r, certains des faits sont clairement Ă©tablis. Les assaillants nâĂ©taient pas des Ăgyptiens. Une âerreur involontaireâ sâest produite dans la zone de guerre, ont dĂ©clarĂ© les deux gouvernements impliquĂ©s. Certains membres de lâĂ©quipage de lâUSS-Liberty ont survĂ©cu Ă cette attaque dĂ©libĂ©rĂ©e; son capitaine, William McGonagle, et mĂȘme Dean Rusk, alors SecrĂ©taire dâĂtat amĂ©ricain.
Il y avait eu collusion entre des factions des gouvernements, afin de justifier une rĂ©torsion massive amĂ©ricaine, lâobjectif final Ă©tant le retrait total de lâinfluence soviĂ©tique au Moyen-Orient, a affirmĂ© Peter Hounam. Mais, sâil y avait vraiment une collusion et si lâaffaire avait pour but des reprĂ©sailles amĂ©ricaines, pourquoi arrĂȘter les avions ?
Qui a arrĂȘtĂ© lâattaque nuclĂ©aire sur le Caire le 8 juin 1967, et pourquoi ? Si nous pouvons dĂ©couvrir qui a jouĂ© le rĂŽle katehonique [ange gardien] il y a 50 ans, nous pourrons ĂȘtre en mesure de comprendre les enjeux actuels.
ApÄrut Ăźn traducere Ăźn limba francezÄ pe Le Saker Francophone:
L’intervention russe en Syrie: piĂšge ou “intervention divine” ?